Pour en finir avec la planète… en beauté!
Le 22 janvier à 15h, Carré de Moscou
Concept
Mourir en beauté, c’est beau.Jean Genet
Et je serai loin, bien loin, et plus bon à rien,
Par la Culture, heureux comme après une femme.Arthur Rimbaud (corrigé)
Pour une fois, le Collectif MANIFESTEMENT eût pu s’en remettre les yeux fermés à [un texte tout fait et épuisant] (lien vers pdf DanielBensaid_CritiqueEcologie politique) servant délicieusement son propos ou aux saillies d’un humoriste hors pair et se contenter d’en tirer deux, trois slogans à peinturlurer distraitement fin décembre sur des banderoles recyclées en vue de la manifestation du 22 janvier 2017... ... mais le chômage technique s’acoquine mal avec les machines conceptuellement désirantes qui sont aux commandes des membres peu écervelés du Collectif MANIFESTEMENT. On ne va donc ni mégoter, ni lésiner, ni chicaner : tous aux abris mentaux !
- Le durable est la version écologique de la bonne vieille Vie éternelle. Un subterfuge laïque pour ignorer le non-renouvelable, dénier le non-recyclable, contourner la mort. La folie de la foi revient toujours au même manque d’imagination entretenu par la peur de rêver : pousser la lâcheté jusqu’à vouloir endurer ce qui n’a que trop duré.
- Originairement, le « naturel » désigne l’ordre des choses et le « contre-nature » renvoie la nature à ce qui distingue en elle le bien du mal. Or cette distinction est ultimement théologique. Donc, persister à utiliser le mot naturel est le meilleur moyen de s’empêcher de penser en préférant croire.
- De l’écologie ambiante, bien-pensante et obligatoire, la manifestation « Pour en finir avec la planète… en beauté ! » veut dénoncer la théologie (le naturel est le bien), moquer la téléologie (il y a un cap et c’est le bon), railler l’eschatologie (l’homme est le moyen de la fin des temps), pourfendre le moralisme (polluer est un péché), déminer la conscience mauvaise (les catastrophes ne sont que catastrophiques) et pointer l’ineptie (la nature ne préexiste pas au mot nature).
- Un changement de paradigme n’est cauchemardesque qu’aux yeux des conservateurs de tous bords, ceux-là mêmes qui ne jurent que par « le changement », qui se veulent les moteurs du « changement », sans jamais en accepter la prémisse : que plus rien du tout ne soit comme avant.
- Les changements cosmétiques ne sont pas plus louables, dignes ou préférables que les changements radicaux : tous les goûts sont dans la culture. Sauf à sacrifier à un leibnizisme inavouable, comme quoi le monde tristement actuel et officiellement détestable n’en serait pas moins, par ailleurs, le meilleur des mondes possibles.
- La fin de l’existence de l’homme n’est problématique qu’à l’esprit fragile des naïfs arrogants qui se croient à l’image de Dieu. Pour les autres, cette fin est une énième anecdote qui n’est pas sans stimuler une philosophique curiosité : la prochaine sera-t-elle plus ou moins croustillante, croquignolette et craquante que la précédente ?
- Il n’est aucune base − autre que romantique, autant dire abyssale, illusoire et vaine − pour opposer, d’un côté, l’ingestion d’un bon spaghetti débouchant immanquablement sur la production d’un étron plus ou moins consistant et, de l’autre, le raffinage du pétrole permettant la production, entre autres, de sacs de course en plastique, avouons-le, bien pratiques.
- Pourquoi un serial-killer pédophile, bedonnant et qui touche les allocations d’invalidité de sa défunte mère depuis 11 mois serait-il moins « la vie » qu’un chouette père de famille, fidèle, sportif et qui rembourse sans mollir depuis 18 ans et demi un prêt hypothécaire à taux variable ? La vie est bonne, ou elle n’est pas (la vie).
- L’activité humaine dérégulerait l’homéostasie (l’autorégulation de la planète et de la vie). Nous serions en plein anthropocène (l’influence de l’homme sur la biosphère en fait une force géologique capable de marquer la lithosphère). Et alors ? Comment être nostalgique d’un passé qui ne l’est pas encore ?
- La manifestation « Pour en finir avec la planète…en beauté ! » n’est pas anti-écologique, ni même a-écologique, mais magnifiquement post-écologique : puisque la vie pollue, la préservation de la vie − fût-elle la vie de la planète (ou, au passage, celle de l’espèce humaine) – ne peut en toute logique être une fin en soi. La mort de la vie est encore de la vie. C’est la fin de la mort qui serait catastrophique.
- L’impératif de la protection de la nature, de la préservation de l’environnement et du sauvetage de la planète en appelle tôt ou tard à « l’avenir de nos enfants ». Ah le « je », le « je », toujours recommencé, toujours poursuivi, toujours en voie désespérée d’immortalisation ! Et si « nos enfants » ne nous avaient rien demandé, même pas de naître, de nous continuer, de nous ressembler ? Poser la question, c’est, à la suite de Frank Zappa, y répondre.
- À voir la joie des enfants jouant avec des diplodocus en peluche et des tyrannosaures en plastique, comment décider de priver leurs lointains descendants-mutants de s’éclater avec des figurines humaines?
- La bien-nommée Terre Mère, rassurante et utérine, donc castratrice et hystérique : pourquoi pas ? Mais le vulvocratisme écologique n’est que le vis-à-vis du phallocratisme industriel, jamais son dépassement. D’une outrance l’autre.
- Le vert est l’allégorie de l’écologie en Occident, là où cette couleur n’est dominante que 6 mois par an. Qu’est-ce à dire ? Que le printemps l’emporte sur l’automne dans l’imagerie folklorique délirante des bigots inconséquents de la sainte « nature ». Qu’on n’est pas sorti de la suprématie du « propre » sur le « sale ». De la supériorité du « juvénile » sur le « croulant ». Du « virginal » sur le « pollué ». De l’auberge primitive qui divinisait le soleil à la sortie de la caverne. Qu’on n’est pas sorti du sacré.
- Paraphrasant la lecture deleuzienne de la lecture nietzschéenne de la dialectique hégélienne du maître et de l’esclave, l’écolo disant « C’est bon, car c’est naturel » est le nouvel esclave : il ne peut affirmer sans nier (car déclarer d’une chose qu’elle est naturelle, c’est déjà nier à une autre qu’elle le soit). Le vrai maître est celui qui dit « Tout est naturel ! ».
- 15bis. Tout est légal !
- 15ter. Tout est bon dans le goudron. Tout est excellent.
ARGUMENTS
10 gestes pour négliger la planète en beauté !
- Faites un maximum d’enfants.
- Sortez de la douche en oubliant de couper l’eau, allez aux toilettes pour pisser sans oublier de tirer la chasse, retournez sous la douche.
- Plus vous chauffez (de préférence au bois) votre logement, plus vous l’aérez. Et inversement.
- Achetez-vous tous les livres dans toutes les langues écrits sur le thème de la protection de l’environnement, envoyez le DVD d’Une vérité qui dérange d’Al Gore à tous les habitants de la planète et organisez des COP21 tous les 21 du mois.
- Offrez à tous les Indiens d’Amazonie une tronçonneuse et un ballon de football.
- Lancez la Biennale internationale des serres, le premier prix allant au candidat qui aura eu le maximum d’effets.
- Transportez-vous jusqu’à la couche d’ozone, disposez votre camp de base en bordure du premier trou venu, partez à la recherche du trou le plus proche et creusez ensuite un canal entre les deux. Réitérez l’opération et veillez bien à ce que premier trou ne se rebouche pas quand vous creusez ledit canal. Au besoin, faites appel à vos amis.
- Rassemblez mi-janvier tous les sapins de Noël (naturel ou en plastique) au pôle Nord, faites-en la plus haute montagne verte de l’histoire de l’art contemporain, boutez-y le feu et attendez en dansant tout autour la fonte définitive de toutes les glaces arctiques. Idem pour le pôle Sud, l’année suivante.
- Partez à la recherche de juifs pleins aux as, convainquez-les de mettre la main à la poche pour payer grassement les meilleurs faussaires au monde qui auront ainsi à cœur de créer de faux manuscrits latins, grecs, hébreux, araméens et sanscrits, suggérant tous un lien étymologique déstabilisant entre les mots na-ture et na-zi.
- Poussez l’incurie jusqu’à venir du monde entier à Bruxelles le 22 janvier 2017 pour prendre part à la contre-manifestation « Pour préserver la planète… en beauté ! » organisée contre la manifestation « Pour en finir avec la planète... en beauté ! » du Collectif MANIFESTEMENT.
100 bonnes raisons de détester la nature
Détester la nature, c’est l’évidence! Du moins pour ceux qui pensent plus loin que le bout de leur névrose...
Mais encore faut-il alléguer de bonnes raisons, que voici :
En contre-point, voici un exemple de 96 raisons parigo-vulgaires* :
Seules les raisons 52, 53, 86 et 100 tiennent le rang où s’élève depuis 2006 le Collectif MANIFESTEMENT. Et encore.
* Tiré de Society, mai 2016.
Pour tout redire autrement :
Anthologie jubilatoire de la catastrophe
(hommage à Thomas de Quincey*)
Une catastrophe n’est jamais qu’un événement plus vertigineux qu’un autre. Une catastrophe, fût-elle fatale, est en effet une accélération spectaculaire de la vie, une sublime poussée d’adrénaline, une occasion unique de créer. Ce que les écolos n’osent pas comprendre : catastrophique et sublime sont synonymes Pire, ils oublient que le sublime en art, depuis Emmanuel Kant, est une imitation (et non une destruction !) de la nature. Parce que c’est « en beauté » que la manifestation veut « en finir avec la planète », le Collectif MANIFESTEMENT, lui, prend acte performativement de la transition du sublime vers le beau, c’est-à-dire de la nature vers la culture.
D’une extrémité jubilatoire :
l’autre
en passant par tous les étapes intermédiaires :
* Thomas de Quincey et Samuel Taylor Coleridge assistèrent un soir à l’incendie d’une fabrique de pianos. Quincey dut abandonner ce spectacle avant la fin. « Quelques jours plus tard, je rencontrai mon hôte platonicien, je lui rappelai l’incendie en le priant de me faire connaître comment ce spectacle si prometteur s’était terminé. «Oh, monsieur, dit-il, il a fini si mal que, unanimement, nous nous sommes mis à le siffler». Or quelqu’un supposera-t-il que (Coleridge) fut un incendiaire, ou seulement capable de souhaiter du mal au pauvre homme et a ses pianos (dont plusieurs, je pense, avec claviers additionnels) ? Au contraire, je le tiens pour être de cette espèce d’hommes qui (...) mettraient, en cas de nécessité, la main à la pompe, encore qu’il soit plutôt gras pour donner une preuve si ardente de sa vertu. Mais quel était, ici, le cas ? La vertu n’était en rien intéressée. Une fois arrivées les pompes à feu, toute moralité s’en remettait au bureau des assurances. Et puisque tel était le cas, il avait bien le droit de satisfaire son goût. Il avait laissé son thé. N’allait-il rien avoir en retour ? Je maintiens que l’homme le plus vertueux, ces prémisses établies, était autorisé à se faire une volupté de l’incendie et de le siffler, aussi bien que tout autre spectacle qui eut élevé une attente dans l’esprit public pour, ensuite, le décevoir.Théorie permaculturelle des organisations
Oui, le ridicule de la détresse managériale à la sauce altero-antiproductivisto-écolo-durable ne connaît plus de limite : la permaculture est désormais au service du management le plus tendance.*
Vos employés en bavent comme des limaces ? No problemo : enfermez-les dans un espace hérissé de palissades, faites-les brouter du fenouil, mâcher de l’aïl, croquer des oignons et chiquer de la ciboulette, puis saupoudrez le tout de petites granules bleues et néanmoins naturelles.
Vous détectez des taches de mildiou sur la peau de votre DRH ? No problemo : installez un canon à chaleur dans son bureau pour en éliminer toute humidité. Récoltez ensuite ses excréments, mélanger-les à du foin pour en faire un authentique purin de prêle, filtrez-le et vaporisez-le là où la peau du DRH est la plus atteinte. En l’absence de résultat probant, on peut, en dernière extrémité, enfoncer un fil de cuivre dans le pied du DRH à sa base. Cette dernière technique est controversée.
Vos techniciens de surface ont un caractère de chiendent et, en plus, ils se rhizoment syndicalement ? No problemo : arrachez-les à leur oisiveté contagieuse, répandez de la paille à leurs pieds (mais pas trop, sinon ils se coucheraient dedans). Des poules de luxe, affriolantes et légèrement sous-alimentées, pourraient aussi en venir à bout. Les plus récalcitrants seront bâchés avec leur propre sac poubelle.
Il règne un climat détestable dans votre organisation, entamant dangereusement la productivité ? No problemo : arrêtez toute activité et laissez votre entreprise en jachère économique afin de biorégénérer le terrain de votre organisation. Vous suspendrez ce faisant le versement des salaires, en attendant l’amélioration du climat social et une pression atmosphérique professionnellement équilibrée. Astuce : laisser une organisation en jachère attirera la faune sauvage des alentours, laquelle contribuera à la biodiversité culturelle du quartier de son implantation.
Ca sent le soufre lors de votre mise au vert annuelle ? No problemo : le soufre est le remède miracle contre les pucerons informatiques et autres insectes prépensionnables, les taupes fiscales, les blaireaux complotistes, les secrétaires volubiles et autres parasites pompant l’air et vos secrets de fabrication en pleine réunion Sécurité et Hygiène.
* Exemple récent, ces deux extraits d’un article paru dans le bimensuel Alteréchos daté du 25 juillet 2016 :
La contre-proposition du Collectif MANIFESTEMENT :
Esthétique de la fin de la planète
Bonne nouvelle pour les esthètes et autres dandys chics de l’apocalypse hype :
grâce au site bien nommé « nature-obsession* », on a la confirmation que, depuis le départ, la fin est tout simplement, bonnement et sublimement... belle, magnifique, majestueuse !
Contemplez plutôt ces trois images saisissantes :
Vue plus détaillée ? Cliquez ici !
Vue plus détaillée ? Cliquez ici !
Vue plus détaillée ? Cliquez ici !
* À toute fin de la planète utile, rappelons qu’obsession, dérivé du latin obsidere « assiéger, assaillir, envahir », est d’abord −c’est-à-dire intrinsèquement− un terme d’art militaire.
Les Mexicains, eux, n’ont pas lésiné le 21 décembre 2016 sur les moyens esthétiques pour répéter grandeur nature ce que pourrait être, si tout le monde s’y mettait en même temps, une magnifique fin pyrotechnique de la planète. La photo ci-dessous ou tout le film de l’événement en témoignent : qui veut la fin belle y met les moyens pétaradants !
«Des gens couraient en flammes, des enfants», rapportent, éblouis, les organisateurs. 31 personnes ont perdu la vie dans l’aventure, ou plutôt, ont artistiquement indexé leur fin à celle de la planète. Hommage à eux. Les 72 blessés seraient disposés à remettre le paquet encore plus fort dès leur sortie d’hôpital. Chapeau bas.
Par contraste, soupirez ici à la vue d’un exemple entre mille d’une fin pas du tout «en beauté», sinon de la planète, de l’espèce humaine : quel mortel ennui!
Déflagration universelle des Droits de la Terre
Préambule
Considérant que nous ne sommes pas partis pour nous taire, et que la présente déflagration se propose de miner les sutures morales d’une présumée communauté indivisible dont les individus, supposés interdépendants, sont dévotement bâtés dans une destinée commune ;
Récusant l’ignominie idéaliste qui prétend puiser dans la frugalité de la ‘‘(bonne) vie naturelle’’ l’accomplissement du bonheur, et qui, dans son incapacité à intégrer la résolution des pires précarités, ne peut que les tolérer ;
Affirmant que nul fardeau ne saurait peser sur les volontés de puissance à l’œuvre dans la vie – fussent-elles ravageuses – et qu’aucune humanité pénitente ne pourrait dès lors prétendre à la dignité dont elle se glorifie dans l’hypostase illusoire et servile de l’homéostasie ;
Proposant de promptement évacuer un double malentendu qui voudrait moraliser les fluctuations du globe sans admettre la dimension précisément « naturelle » de toute destruction - prédation, parasitisme - et nombriliser ainsi le trop humain érigé au statut de préservateur de la Sainte Vie qui, sans droits, pourrait bien se passer de lui ;
Estimant inconsistante et fallacieuse la logique du syllogisme qui fonde dans le postulat d’un nouveau droit naturel l’imposition homogène et grégarisante du Bien universel ;
Postulant que tout régime de droit est indissociable des fluctuations de valeurs dont l’homme est le seul véhicule, et que nulle Tutelle Naturelle – et naturellement pourvue de droits – ne saurait lui garantir la sortie du trivial comme de l’abject pour peu qu’il se soumette à elle (et ce bien qu’il n’y parvienne pas de lui-même) ;
Doutant de l’urgence dévote dans laquelle se pressent les prêcheurs d’un arrière-monde essentialisé - aussi fixe que leurs idées - pour un mouvement-statique collectif de moralisation ;
Nous,
habitants de la Terre mais néanmoins chantres des plus sublimes catastrophes,
proclamons la présente Déflagration universelle des Droits de la Terre
comme l’affirmation jubilatoire et réalistement imparable d’une pensée post-écologique revenue de tous les subterfuges théologiques, téléologiques, eschatologiques aux fondements des pires inepties écologico-prédicatrices ; comme la reconnaissance infaillible d’une grandiose accélération de la vie dans la dissolution cosmique de la Terre ; et dès lors comme cet appel nécessaire mais non moins enthousiaste : que la fin soit une fête.
Article premier
Que l’on considère la Terre comme un être vivant n’anéantit aucunement – voire même corrobore malgré soi – l’argument selon lequel la vie s’exprime ultimement dans la violence de ses dynamismes, fussent-ils fatals.
Article 2
La diversité constitutive de la Terre passe avant tout par les flux du devenir selon lequel ceux qui la peuplent n’ont de stabilité qu’idéale : qu’ils l’emportent ou qu’elle les emporte de manière indéterminable vers une fin encore indéterminée, tels sont les pronostics qu’il nous faut assumer tant ils suivent – au contraire de l’homéostasie – les mouvements et rapports opérés entre la Terre et l’ensemble des êtres qui la peuplent, ou plutôt l’un dans l’autre.
Article 3
La mauvaise conscience humaine quant à l’instrumentalisation de la vie n’implique pas pour autant sa sanctification ; il y a nuance entre consommation et idolâtrie.
Il est peu probant de miser sur la « dignité » et le « bien-être » - notions éminemment anthropocentristes - en projetant nos lubies justicières sur la vie non-humaine. Gageons dès lors que la dignité se situe ailleurs, puisqu’à ce sens douteux voire religieux du bien-être et du respect de la vie doit être substitué un dessein autrement plus noble : une problématisation active, critique et lucide des présupposés triviaux qu’elle épouse.
Article 4
Que les Hommes aient tenu et tiennent encore à s’octroyer autant de droits que nécessaire – qu’ils soient effectifs ou inopérants -, et que ces derniers finissent par constituer le prisme par lequel les Hommes se rapportent éventuellement à l’altérité ne valide en aucun cas le présupposé selon lequel tout être vivant non-humain – c’est-à-dire situé hors de tout système de droit exclusivement humain – devrait en bénéficier ou s’y soumettre. Dès lors, contre tout biais anthropocentrique, tout désir de respect ou de préservation des autres êtres vivants doit passer par l’établissement de devoirs eux aussi exclusivement humains, mais surtout libres d’être suivis ou foulés au pied. C’est en vertu de cela que chacun peut affirmer sans honte sa propre volonté, et non pas se soumettre au tribunal moral porté par un consensus grossier.
Article 5
Conformément à l’Article 4, il n’y a pas lieu de soumettre la Terre et tous les êtres qui la composent à la titularité d’un régime de droit censé leur être accordé. En revanche, tous les droits inhérents et reconnus dans cette Déflagrations doivent être jalousement arrachés, gardés et revendiqués comme inaliénables par tous ceux qui y aspirent pleinement.
Article 6
De l’inter-limitation de tous les droits ici déflagrés, il résulte que le conflit qui en émergerait se résolve de la manière la plus statique, à l’image du panorama harmonieux projeté par l’humain sur la Terre, et selon laquelle cette dernière, tout comme ce dernier, devrait tendre vers la sa(i)nt(et)é que seul l’équilibre pro-cure.
Article 7
L’imposition desdits droits à l’ensemble vivant qui compose la Terre implique celui de vivre et suppose le maintien et la persévérance des cycles et processus vitaux.
C’est pourquoi la pleine santé et l’élan vital de chaque organisme exigent l’existence de conditions de vie parfois mortelles - extrêmophiles -, la mutuelle phagocytose des individus, et la multiplication des pollutions, de préférence nocturnes.
Il en va de même de la structure génétique de chaque organisme qui, soumise au droit et à l’exigence d’inaltérabilité nous prouve que Darwin avait tort, et que le démiurge créa le code en brins immuables
Article 8
Contre l’injonction ambiante, bien-pensante et obligatoire selon laquelle tous les êtres humains auraient le devoir de respecter la Terre à la manière d’une personne morale, la présente Déflagration répudie toute exaltation irréfléchie et croupissante de la préservation de la nature et de l’harmonie comme unique dessein et destin souhaitable, libérant dans le même mouvement les potentialités de pensée, de vie et de mort.
Article 9
Les êtres humains dont la volonté est d’assurer la hauteur de leurs considérations, de leurs décisions et de leurs actes – fussent-ils aussi dévastateurs que gracieux – doivent ratifier la présente Déflagration, et ainsi reconnaître que le couple de concepts « bien-être humain »-« préservation de la planète » - cache-misère moral, subterfuge conservateur abyssalement creux – est incommensurable aux mouvements vitaux de la Terre virtuellement traversés par autant de fins imaginables, et pourquoi pas glorieuses.
Article 10
Ce faisant, les êtres humains ont le devoir de promouvoir et de prendre part à l’apprentissage, à l’analyse, à l’interprétation et à la transmission de modes de vie soumis à cette Déflagration; d’où découle leur irrémédiable incompatibilité avec un pieu désir d’homéostasie hérité du dernier paradis en vogue
Article 12
Là même où certains individus nostalgiques investiraient les institutions d’un pouvoir de défense des Droits de la Terre aussi inopérant que celui censé défendre les Droits de l’Homme, la présente Déflagration appelle à un pouvoir jurisprudentiel sur base du droit inaliénable, accordé à chacun, de jouir d’une fin en beauté, à la manière qui lui siéra le mieux.
Article 13
Les êtres humains ont la responsabilité de ne jamais laisser empiéter, jusqu’à l’asphyxie, toutes les injonctions d’un tribunal moral au respect, à la protection, à la préservation de la nature, et à la restriction de soi sur leurs plus nobles aspirations, pensées, et actions.
Article 14
Conformément à l’Article 12, les êtres humains ont le devoir de tout mettre en œuvre pour jouir des modes de vie, des modèles économiques et des politiques qui coïncident avec ce qu’ils souhaitent promouvoir de plus noble, et qui respectent les droits reconnus dans la présente Déflagration. Car enfin, postulant la haute pertinence d’une pensée post-écologique, cette Déflagration réaffirme l’idée primordiale suivante : qu’une écologie qui n’est pas en même temps sociale et mentale, est une entreprise de contrôle social et mental.
Les générations futures, c’est comme la déconfiture
Les générations futures, moins on les considère, plus de nos phantasmes à l’endroit de que l’on voudrait qu’elles soient on les libère !
Et les générations futures, qui n’ont rien demandé et encore moins d’exister, sont déjà encapsulées dans un site qui enjoint « les cerveaux de demain à penser à 360° » pour elles :
« Demain, c’est aujourd’hui », décrètent-ils péremptoirement. Et demain, ce sera hier? OK, mais maintenant, c’est quoi ? C’est plus que ce que c’était. Bref, c’était mieux demain. Comprenne qui pourra? Non: advienne que pourra. Et rien n’advint. Et la terre redeviendra « informe et vide : il y aura à nouveau des ténèbres à la surface de l’abîme. » (La Genèse 1.2).
Et le Collectif MANIFESTEMENT vit que cela était bon.
De quoi la fin de la planète est-elle la beauté?
Réponse 1
Réponse 2
Réponse 3
etc.
L’invité d’honneur : Donald John Trump
L’invité d’honneur : Donald John Trump
Lettre envoyée le 21 novembre 2016 à madame Denise BAUER, ambassadrice des Etats-Unis d’Amérique en Belgique :
Hymne
La balèze détestation
(sur l’air bien connu de La mauvaise réputation de Georges Brassens)
Au village globalisé
Je crache les quatre vérités ;
Que j’ pille la terre ou la dévaste,
Je pass’ pour un iconoclaste.
Je pollue pourtant grâce à mon scrotum
En pétant gaiment et ad nauseam,
Mais les Terriens n’aiment pas que
L’on s’fout’ d’une terre qu’ils croient pour eux…
Non, les Terriens n’aiment pas que
L’on s’fout’ d’une terre qu’ils croient à eux…
Tout le monde rabat la joie,
Sauf les joyeux, ça va de soi.
Les manifs antinucléaires,
Je les passe dans mon lit, pépère.
Le manche de mon compteur geiger,
Je me l’empale dans le derrière.
Je me fous de tout et je surconsomme,
Contemplant la fin tel un vrai surhomme.
Mais les Terriens n’aiment pas que
L’on s’fout’ d’une terre qui fait ce qu’elle veut…
Non, les Terriens n’aiment pas que
L’on s’fout’ d’une terre qui a pas b’soin d’eux…
Tout le monde perd son sang-froid
Sauf les sangs chauds, ça va de soi.
Quand j’ croise un décroissant fâcheux
Rejouant les sauvages heureux,
Je bétonne sec le PIB
En déterrant les macchabées.
J’extermine les espèces menacées
Ah mort la foutue biodiversité !
Mais les Terriens n’aiment pas que
L’on s’fout’ d’une terre bientôt hors-jeu…
Non, les Terriens n’aiment pas que
L’on s’fout’ d’une terre qui est un non-lieu…
Tout le monde s’y croit chez soi,
Sauf les martiens, ça va de soi.
Pas besoin d’être grand poète
Pour aimer l’ moiré des marées noires.
Sur la plage les rieuses mouettes
Font du plastique leur seule mangeoire
Je ne veux pourtant la mort de personne
De l’éternité seule je me tamponne.
Mais les Terriens n’aiment pas que
L’on s’fout’ d’une terre qui est même pas bleue…
Non, les Terriens n’aiment pas que
L’on s’fout’ d’une terre qui se mord la queue…
Tout le monde se veut écolo
Sauf les prolos, c’est rigolo.